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Et pour ce qu 'on trouve en escript Es anciens romans, ou on lit Qu'avoit jadis mal et délit Lors en la Doloureuse garde, Quant Lancelot le gean prit, Son escu tumba par despit Devant le nain qui le reprit, Commis au paveillon pour garde, Puis la nomma Joieuse garde. (str. 4)

Les assaillants, qu'on appelait les «estrangers», étaient installés non loin de là dans un monastère, où ils s'équipaient pour le combat et recevaient instructions et recommandations de l'ermite qui y vivait.

Hermite qui les adressoit, L'emprinse savoir leur faisoit Du pas et chascun conseilloit Comment il se gouverneroit Affin d'avoir pris et ruby. (str. 24)

Cet ermitage faisait sans aucun doute aussi partie de la mise en scène, cela sous l'influence des mêmes romans, où les ermites jouent le rôle de conseillers spirituels et même parfois de médecins des chevaliers errants. Tout cela était lié avec la représentation qu'on se faisait de l'époque des chevaliers de la Table Ronde, à propos de laquelle Thomas Malory, dans son arrangement des romans français du cycle arturien, écrit:

«… for in these days it was not the guise of hermits as in nowadays, for there were none hermits in those days but they had been men of worship and of prowess; and those hermits held great household, and refreshed people that were in distress»

Aux combattants déclarés les plus heureux dans les différents duels par la décision des juges, parmi lesquels se trouvait Antoine de la Salle, célèbre écrivain du XVe siècle, resté longtemps au service de la maison d'Anjou, on distribua des prix: des brillants aux «tenants», des rubis aux assaillants. Ces prix étaient d'égale valeur. Les rubis aussi bien que les brillants, selon la remarque de G. Bian-ciotto, «restent avant tout essentiellement symboliques, et reviennent d'ailleurs aux dames, non aux combattants». Les chevaliers reçurent en tout 36 rubis et 54 brillants (str. 218).

À la fin de la joute les juges désignèrent les deux meilleurs combattants, un parmi les «défendants», et ce fut le gendre du roi, Ferry de Lorraine, l'autre parmi les assaillants, et cet honneur revint au seigneur de Florigny. Le premier reçut «un fermaillet d'or tout mar-sis, semé de diamans et rubis», dont l'auteur nous dit qu'il valait «mille francs», ajoutant:

Et certes si plus je disoye, Suis certain que n'en mentiroye. Et l'autre, un cheval de combat. (str. 216)

Mais laissons de côté la joute, qui est décrite en détail dans le manuscrit, et tournons-nous vers l'auteur du texte. Il faut tout de suite dire que son nom, qui n'est pas indiqué dans le manuscrit, ne nous est pas connu, et il y a bien peu de chance que l'on puisse un jour l'établir. Il faudrait un document d'époque où l'origine du texte serait précisée, mais dans les comptes et autres papiers du roi René que nous connaissons, il n'y a rien de tel, ce qui laisse peu d'espoir.

Mais même si nous savions son nom, il n'ajouterait presque rien à son portrait, tel qu'il est dépeint dans l'œuvre. Et ce portrait est suffisamment précis et clair pour connaître cet homme et appréhender son univers mental. Sous ce rapport, notre texte est bien supérieur à la description poétique de la joute de Tarascon dont l'auteur est Louis de Beauvau. Le nom de celui-ci est connu, puisqu'il est indiqué au début du texte, mais sa personnalité reste, à la lecture de son œuvre, terne, sans relief. Et il est impossible de dire à son sujet quoi que ce soit, en dehors de ce qui est déjà connu par d'autres sources.

Il est clair que notre auteur était un moine, et plus précisément un moine augustin. C'est ainsi qu'il est représenté dans une miniature montrant la scène de la présentation du manuscrit au roi René et c'est ainsi qu'il se présente lui-même quand il dit:

Je sui presque demy sauvage, N'ay congnoissance hors ce boucaige, Nuls temps ne voy gens de paraige Fors en ville, court ou festaige. (str. 238)

Il souligne très expressivement la vaillance d'un des participants à la joute en disant que:

Pour l'arceveschié de Rouen N'eusse valu estre son pleige Non туе d'Angiers gran doyan. (str. 129)

À ses yeux ces deux dignités ecclésiastiques sont les plus hautes dont il puisse rêver, et le fait qu'il mentionne justement celles-là prouve qu'il est Angevin.

La description poétique de la joute a été composée selon les propres mots de l'auteur «soubs la noble obéissance», c'est-à-dire sur l'ordre du roi René (str. 9). Ici se posent deux questions: quand l'œuvre fut-elle commandée et quand fut-elle achevée? Il n'arriva à Saumur, écrit-il, que pour la fin des festivités, le 3 août (str. 8). Et bien qu'il dise qu'il se rendit là pour recueillir des témoignages dignes de foi et «au vray escripre» les événements, comme s'il avait reçu la commande avant son arrivée il semble bien qu'il ne la reçut qu'à son arrivée à Saumur. Sinon, il aurait dû venir plus tôt.

Quoi qu'il en soit, une des raisons, sinon la principale, qui l'amenaient là, était cette «bonne curiosité», qu'il employa d'après lui, pour observer la joute (str. 239). La curiosité est d'autant plus compréhensible que les combats de chevalerie l'enthousiasmaient. Il écrit à propos de l'un des duels:

La eusses veu plaisans debas! ... La veissés jeunesse florir, Haulte noblesse seigneurir Soubz le ciel n'avoit plus bel estre; Homme ne feust, peu enveillir, Estre malade ne mourir: De toute joye secourir Pouvoit chascun et s'i repestre! (str. 133)

Il était manifestement animé d'un grand respect pour la chevalerie et la culture courtoise. Arrivé à Saumur, il fit

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